5 ans au Canada : mon bilan

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Je suis sure que vous avez déjà toutes eu cette question en entrevue « où vous voyez-vous dans 5 ans ? » Et là vous avez répondu une phrase bateau déjà préparée histoire de vous assurer d’avoir le job. Et bien en tout cas si on m’avait posé cette question il y a 5 ans, je n’aurais pas du tout imaginé être là où j’en suis aujourd’hui. Et oui, ça y est, ce 3 octobre 2020, marque 5 ans depuis le début de mon aventure canadienne. C'est fou, j'ai l'impression que mon départ date d'hier, et puis là je me réveille et ça fait déjà 5 ans que je suis ici ! Bien évidemment beaucoup de choses se sont passées en 5 années, mais je dois avouer que tout s'est quand même enchaîné rapidement de mon côté. J'ai décidé de partager avec vous le bilan de mon aventure canadienne qui s'est plutôt transformée en "vie canadienne" tout simplement (une aventure de 5 ans ça devient long haha), pour peut-être donner de l'espoir à certaines, pour en rassurer d'autres mais aussi pour essayer de vous aider dans votre choix (je m'adresse à celles qui hésitent à venir/rentrer). Bref, je ne vais pas trop m'étaler car j'ai déjà raconté pas mal de choses dans d'autres articles, je vais juste vous décrire brièvement les 5 dernières années de ma vie au cours de des prochains paragraphes.

Le 3 octobre 2015, je prends cet aller sans retour Paris-Montréal. J'ai encore du mal à y croire. Les mois d'avant ont été tellement difficiles pour moi, j'ai vécu tellement de peine que j'ai du mal à croire, en étant dans l'avion, qu'une chose de positive est en train de se passer. Le fait de rejoindre mon frère est un tel soulagement, mais également le fait de me retrouver seule, car j'ai fait le choix de ne pas vivre avec lui et de vivre seule. C'était la première fois de ma vie que je vivais seule (avant ça j'ai vécu 4 ans en couple), et ce fut un élément tellement déterminant dans mon épanouissement. Je me débrouille toute seule, pour prendre mes repères dans mon nouveau pays, dans ma nouvelle ville, dans ma nouvelle vie. Je retrouve des amis de longue date (oui on est à Montréal, royaume des français lol), et, alors que j'étais dans un esprit d'éviter les français à tout prix, ça me fait quand même du bien. En réalité, je n'ai pas vraiment eu d'ami(e)s québécois(e)s avant au moins deux ans dans le pays.

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Je trouve un emploi au bout de deux mois à Montréal, dans mon domaine, pas super bien rémunéré, mais ce fut une très belle expérience pour commencer. Début 2016, je célèbre mes 25 ans à New York (l'un des superbes avantages d'habiter à à peine 7h de voiture de la Big Apple). C'est ma première fois à NY, je suis émerveillée. Ce fut mon plus bel anniversaire. Aussi, je renoue avec la danse, autre élément contribuant énormément à mon épanouissement. Premier été à MTL, découverte des festivals et de tous les événements, je suis totalement charmée par l'été montréalais. Côté cœur, je vis ma best life de célibataire haha. Tinder est un échec total pour moi, j'ai eu quelque chose comme 5 ou 6 dates qui se sont arrêtés au premier date... Loose totale. Mais sincèrement, je ne suis pas du tout à la recherche d'un partenaire, je sors d'une relation toxique de 4 ans, j'ai besoin de temps pour moi et je ne veux penser qu'à moi.

Ma première année passe, j'ai quand même sacrément voyagé, en fait c'est l'année où j'ai le plus voyagé dans ma vie. J'ai été 3 fois à Toronto, 2 fois à New York, à Ottawa, à Québec, à Mont-Tremblant, à Tadoussac, à Saguenay, à La Malbaie, à West Palm Beach et enfin à Cuba. L'année de mes 25 ans fut littéralement the best year ever ! Après un an, c'est définitif, je ne suis pas prête de rentrer à Paris. D'ailleurs psychologiquement je ne le suis pas, rien que l'idée de rentrer m'angoisse. À peine un an passé depuis le décès de ma mère, c'est encore trop frais, je ne suis pas prête. En revanche, j'ai envie d'autre chose, mes 3 visites à Toronto m'ont convaincue d'aller m'y installer. Décembre 2016, me voilà avec toutes mes affaires direction Toronto. Appartement trouvé mais pas de job. Je resterai deux mois sans job là-bas, à devoir payer un loyer de 1095$ pour un studio. Premier échec pour moi. Je n'avais pas prévu ça, mes économies en prennent un sacré coup. Je rencontre du monde, pas mal de français, mais aussi des canadiens anglophones. Au bout de 4 mois, je ne me sens pas aussi bien qu'à Montréal, je déteste mon boulot (pas dans mon domaine), mon loyer et mes factures sont quand même élevés, je ne peux pas me permettre autant de loisirs et voyages que lorsque je vivais à Montréal. Je prends la décision de rentrer à Paris temporairement, pour me refaire les poches, lancer ma demande de RP, et revenir au Canada. Cependant, Dieu/l'univers/le destin (dépendamment de ce en quoi vous croyez ou non), en a décidé autrement. Je rencontre mon copain (qui vit à Montréal), et je décide en juin 2017 de revenir m'installer à Montréal. Au début, je voyais mon déménagement à Toronto comme un échec, je n'ai pas réussi à m'intégrer dans la plus grande ville canadienne. Aujourd'hui je le vois comme une superbe expérience de 6 mois qui m'a permis de faire de belles rencontres, de vivre dans un environnement anglophone et d'améliorer mon anglais, de découvrir une autre ville, d'avoir une autre vision du Canada (qui ne se résume ni à Montréal et certainement pas qu'au Québec).

Retour à Montréal : comme si je n'étais jamais partie. C'est vraiment comme si j'avais juste mis pause sur ma vie pendant 6 mois, et que je la reprenais. Bon avec un petit bonus à la clé, j'ai trouvé l'amour, l'amour canadien haha. Mon copain est canadien d'origine haïtienne, né dans la banlieue de Montréal, et ayant vécu toute son adolescence à Miami. Du coup, je vous avoue que culturellement, c'est assez différent. Nous n'avons pas vraiment les mêmes références. Des fois, surtout quand tu veux faire des blagues, c'est un peu chiant, mais dans l'ensemble c'est quand même enrichissant. À propos de ça, j'en profite pour glisser un petit mot sur le dating game au Canada. Les canadiens, et je dirais même les nord-américains, adorent le terme "fréquenter". C'est-à-dire, on se voit, on est plus ou moins exclusifs, mais on est pas en couple. Et d'ailleurs, en général ils ont besoin de temps avant de s'engager dans une relation (je parle pour les hommes hétéros notamment). En revanche, lorsqu'ils s'engagent, tout peut s'enchaîner rapidement (emménagement, mariage, bébé, etc.). Attention, d'une, chaque relation est bien évidemment différente, de deux, sachez qu'une relation de couple où chacun vit de son côté peut être bénéfique, et enfin, mariage, enfants, etc n'est pas une fin en soit, et je conçois que ce ne soit pas le but de toutes. Je vous partage juste ma propre expérience ainsi que celles d'autres femmes que j'ai rencontrées.

Automne 2017, mon PVT expire, j'obtiens mon CSQ (certificat de sélection du Québec) juste avant, et enchaîne donc avec un permis de travail fermé avec mon employeur de l'époque que je quitterai à peine au bout de 6 mois. Mon bilan après deux ans au Canada est plus que positif. À mon retour de Montréal, je m'investis beaucoup plus dans la danse, et me fais mes premièr(e)s véritables ami(e)s québécois(e)s. La majorité sont des enfants d'immigrés, comme en France en fait, ça doit être une chose commune qui nous rassemble, peu importe le pays dans lequel on vit. Janvier 2018, je change de boulot, et dois donc refaire un nouveau permis de travail fermé. Petite anecdote : un samedi matin je vais à la frontière à Lacolle, j'arrive vers 11h, une douanière me dit "il est trop tard, on ne délivre plus de permis de travail aujourd'hui, il faudra revenir lundi". Je lui explique, que je suis supposée commencer mon nouveau job lundi à 9h, comment je fais ? Elle me dit "essaie d'aller à un autre poste frontalier." Le plus proche est celui de Cornwall. Je conduis jusque là-bas, et quand j'arrive, un douanier me dit "on ne délivre pas de permis de travail ici", je le regarde avec les yeux du chat botté, et le supplie "svp monsieur je ne peux pas partir d'ici sans mon nouveau permis de travail, svp, svp, svp !". Il me fait un petit moment de suspense, et au final accepte de le faire (je tiens à préciser qu'il n'y avait personne et que les douaniers ne faisaient vraiment pas grand chose). Bref, j'ai obtenu ce fameux permis de travail. Quelques jours après, j'envoie mon dossier pour la résidence permanente.

L'hiver 2018 fut difficile et long. Beaucoup de tempêtes de neiges, il a fait très froid et ça a duré jusqu'à début mai. Mais du coup, l'été 2018 fut très chaud et humide. Canicule en veux-tu, en voilà ! Je me souviens que j'étais super heureuse d'avoir fait mon big chop parce que Seigneur, il a fait chaud ! J'ai célébré ma première année de relation avec mon chéri au Mexique : super voyage. Cette année-là, j'ai commencé à faire des battles de danse. C'est un gros accomplissement pour moi. Je réalise que j'ai tellement gagné en confiance, que j'ai décidé de me lancer dans des compétitions. Puis du coup, plus je participe à des événements, plus je rencontre de personnes. Automne 2018, je rentre en France pour la première fois depuis que je suis partie. Contrairement à il y a deux ans, l'angoisse est partie. J'ai fait mon deuil, rentrer à Paris est un véritable plaisir. Voir mes proches me fait un bien fou, bien manger aussi me fait un bien fou lol, me promener dans Paris n'a jamais été aussi agréable. En revanche, au bout de 10 jours, lorsque je reprends l'avion direction Montréal, je suis contente, contente de rentrer chez moi. Au bout de 3 ans au Canada, je réalise que ma maison n'est définitivement plus la région parisienne, chez moi, c'est Montréal.

L'année 2019 commence, je change encore une fois de boulot, je retourne donc à la frontière pour un nouveau permis de travail (le dernier Dieu merci). Ce job est le meilleur que j'ai eu dans mes 10 années de carrière. Je deviens consultante en hôtellerie, je fais des études de marché pour des projets hôteliers et touristiques et j'obtiens aussi le salaire le plus haut que je n'ai jamais eu. En février 2019, plus d'un an après avoir envoyé mon dossier pour la RP, j'obtiens enfin la demande de visite médicale. Je me dis que d'ici l'été je devrais avoir ma résidence : absolument pas haha. Avec ce nouveau job, je commence à contempler l'idée de reprendre l'école. Je réalise qu'un diplôme universitaire m'aidera à évoluer en terme de carrière et de salaire. Mais je ne sais pas quoi faire, et puis sans résidence, je ne peux pas aller à l'école.

Bref, beaucoup de stress par rapport à ma demande de résidence permanente cette année-là. Chaque mois je me connecte pour voir où en est l'avancée de mon dossier. Je n'aurai pas de nouvelles avant fin octobre, lorsque je reçois le fameux email de confirmation, qui demande d'envoyer un ultime papier signé, une copie de son passeport et des photos d'identité. Le 13 novembre, je reçois dans ma boîte aux lettres le fameux graal, la confirmation de ma résidence. Voilà, après 4 ans, 1 PVT, 3 permis de travail fermés (et près de 3000 $ déboursés en passant), je deviens résidente permanente. Tout tombe à pic car j'ai pris ma décision quant à ma reprise des études, je m'inscris à HEC Montréal pour commencer à la session d'hiver 2020. 2019 se termine très bien, j'ai ma résidence, j'ai un bon job, je vais reprendre l'école, j'ai deux beaux voyages de prévus en 2020, et nous avons prévu d'emménager ensemble, mon copain et moi, à l'été 2020.

L'année 2020 commence très bien aussi. Fin janvier je pars au Mexique 3 petits jours pour faire une surprise à mon meilleur ami qui fête ses 30 ans là-bas. Best 3 days of the year vous l'aurez compris, car un mois et demi plus tard comme dit Cardi B : CORONAVIRUS SHIT IS REAL !!!! Ma première session à l'école se passe très bien, mais évidemment je la terminerai à distance. Mon voyage en Martinique, prévu fin mars 2020 est bien sûr annulé. Ça m'a foutu un coup ça, je dois l'admettre. Nous avons enterré ma maman là-bas, il y a déjà 5 ans, donc j'avais hâte d'y retourner et de me rendre sur sa tombe, mais aussi pour voir ma famille et mon grand-père qui n'est plus du tout jeune et qui est très fatigué. Ça ne se fera pas en 2020 malheureusement. Je croise les doigts pour que cela se fasse en 2021. Le confinement s'est plutôt bien passé de mon côté et beaucoup de positif en est quand même ressorti. Je ne l'ai pas précisé avant, mais j'étudie en création d'entreprise et en développement durable. Au début de l'année, j'avais une vague idée de ce que je souhaitais faire en matière d'entrepreneuriat, aujourd'hui, je travaille sur mon plan d'affaires :).

Autre point positif, j'ai emménagé avec mon copain. Cela s'est fait dans des conditions particulières, mais aujourd'hui, après 3 ans de relation, nous vivons enfin sous le même toit, et c'est quand même agréable. Professionnellement, je travaille désormais à temps partiel (une des conséquences du coronavirus), ce qui me permet de prendre plus de cours à l'école et donc d'obtenir mon diplôme plus rapidement. Et puis maintenant, je n'ai que mon projet, voire, mes projets en tête. Je vais rentrer quelques jours en France à la fin du mois, histoire de souffler des derniers mois qui ont été assez éprouvants, et comme je l'ai écrit plus haut, j'espère pouvoir aller en Martinique début 2021.

En conclusion, ces 5 dernières années furent littéralement les meilleures de ma vie jusqu'à présent. Je trouve ça incroyable comment, après avoir vécu les pires mois de ma vie, j'ai su me relever et décidé de vivre le meilleur par la suite. Il y a eu des hauts et des bas bien sûr, en 5 ans, c'est normal, mais à part lorsque je vivais à Toronto, je n'ai jamais eu le doute d'être au mauvais endroit. Le Canada a été une libération, une révélation, une thérapie pour moi. Je connais Montréal mieux que Paris, ça c'est indéniable. Au bout de 5 ans, rentrer vivre en France me paraît inconcevable. Ma vie est ici (pour le moment). Il est certain que je ne quitterai pas le Canada avant d'obtenir la citoyenneté canadienne. Les hivers sont rudes et je sais que c'est l'une des choses qui me fera quitter ce pays. Cependant, je veux avoir la possibilité de pouvoir y revenir quand bon me semble, car au final, le Canada c'est chez moi :)

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Enfin, un petit conseil pour terminer cet article : écoutez votre coeur ! Parfois, on se force à rester à un endroit, dans un travail, dans une relation alors que cela ne nous apporte rien, voire, nous fait souffrir. Il est normal d'essayer, de réaliser que l'on s'est peut être trompé, et de faire machine arrière. Ne le voyez pas comme un échec mais plutôt comme une expérience de vie. Je connais beaucoup de personnes qui ont quitté le Canada au bout de 5-6 années car elles ne s'y sentaient plus aussi bien. Aussi, il n'est jamais trop tard. Si vous avez plus de 35 ans (âge limite pour le PVT), et/ou si vous avez des enfants et que vous souhaitez venir vous installer au Canada, ne soyez pas découragées par les démarches, tout est vraiment faisable. Écoutez votre coeur, allez où bon vous semble, n'ayez pas peur de réaliser vos rêves !

Nanoushka.

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